Travailler en Russie

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Alexandre Latsa - Sputnik Afrique
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Dans les pays occidentaux, les jeunes diplômés ou non diplômés qui cherchent du travail se trouvent confrontés à des difficultés de plus en plus importantes. Dans la plupart des pays de l'OCDE, le chômage est à un niveau élevé et en augmentation, que l’on pense à la France, l’Irlande, l’Espagne ou la Grèce, sans oublier les USA…

Dans les pays occidentaux, les jeunes diplômés ou non diplômés qui cherchent du travail se trouvent confrontés à des difficultés de plus en plus importantes. Dans la plupart des pays de l'OCDE, le chômage est à un niveau élevé et en augmentation, que l’on pense à la France, l’Irlande, l’Espagne ou la Grèce, sans oublier les USA…

Dans la plupart de ces pays, on constate que l'immigration est de plus en plus contrôlée et de plus en plus difficile, ce qui montre l’inquiétude des gouvernements face à l’avenir, au chômage  et à la situation sociale. Dans tous ces pays, pour ceux qui veulent partir, le rêve d’aller chercher du travail dans un autre pays occidental (Amérique, Irlande, Angleterre) s’est lentement effrité et si le Canada et l’Australie restent des zones d’immigration  économique, les conditions d’accession au marché du travail et à la résidence y sont de plus en plus difficiles. Ainsi, ceux qui souhaitent venir travailler en Russie sont de plus en plus nombreux. En Russie, la situation est particulière. Le chômage baisse, la croissance économique se poursuit, et il y a un manque de main d’œuvre dans certains secteurs. Les autorités commencent à lutter sérieusement contre l’immigration clandestine, mais en même temps, elles cherchent à encourager l’immigration définitive, dans le cadre d’une planification démographique qui se met progressivement en place. De l’extérieur de la Russie, il est difficile de comprendre à quel point les flux de populations étrangères sont importants dans le pays.

J’ai déjà parlé dans une autre tribune du très grand nombre d’étrangers qui émigrent vers la Russie et ceux-là ne sont pas des émigrants fantômes. Selon les chiffres officiels des contrôles aux frontières  pour l’année 2010, ce ne sont pas moins de 13.6 millions d’étrangers qui sont entrés sur le territoire de la fédération de Russie. 65%  de ces 13,6 millions d’étrangers étaient des hommes et 35% des femmes. Bien sur tous ces étrangers ne sont pas restés en Russie et 9,7 millions d’entre eux sont ressortis du pays. Le gros des étrangers entrants pour l’année  2010 venait d’Ukraine (21% des entrées soit 2.856.000 personnes), devant l’Ouzbékistan (14% des entrées soit 1.906.000 personnes), Kazakhstan (10% soit 1.306.000 personnes), le Tadjikistan (7% soit 952.000 personnes), l’Azerbaïdjan (6% soit 816.000 personnes) et la Moldavie (680.000 personnes). Ces six pays du monde postsoviétique ont totalisé à eux seuls près de 8,5 millions d’entrées. Au 31 décembre 2010, les services d’immigration estimaient qu’un peu plus de sept millions d’étrangers se trouvaient sur le territoire de la Russie, tout du moins légalement. Bien sur l’oblast de Moscou à lui seul a attiré près de 2,4 millions d’étrangers.

Il faut préciser qu’a ces immigrés légaux, s’ajoutent des immigrés illégaux, très nombreux si l’on en croit les dernières estimations synthétisées par mon collègue Hugo dans une de ses récentes tribunes: "En juillet 2010, Dimitri Medvedev affirmait que 4 millions de travailleurs se trouvaient en situation irrégulière en Russie. Des associations de défense des droits de l'homme évoquent cinq à sept millions de personnes, dont la majorité se trouverait dans la région de Moscou. Selon la police moscovite, la capitale compterait à elle seule 500.000 immigrés illégaux, principalement originaires d'Asie centrale et des républiques caucasiennes (hors fédération de Russie)". Une grande partie de ces clandestins vient des pays d’Asie centrale (hors Kazakhstan qui fait partie de l’union eurasiatique) et ces migrants constituent le gros des troupes des gaustarbeiters, ce nouveau lumpenprolétariat. Par exemple, pas moins de 580.000 citoyens kirghizes, soit un dixième de la population de ce pays centre-asiatique, résideraient en Russie, dont une infime partie d'entre eux de façon légale. Pour cette raison sans doute, le pouvoir russe a récemment indiqué vouloir durcir les lois sur l’immigration clandestine et obliger les migrants légaux à passer des tests de langue, d’histoire et de droit russe, et ce afin de rationaliser les flux migratoires.

Mais les citoyens de l’espace postsoviétique ne sont pas les seuls à émigrer en Russie, les Européens de l’ouest sont également de plus en plus nombreux à choisir la destination russe. C’est l’Allemagne qui est en tête en Europe puisque pas moins de 482.000 Allemands sont entrés sur le territoire de la Fédération de Russie en 2010! Il ne s’agit pas de 482.000 immigrants bien sur, mais la bonne santé des relations économiques entre les deux pays encourage l’expatriation des Allemands.

Pour ceux qui viennent travailler en Russie pour le compte d’une multinationale, la voie est toute tracée. Mais pour ceux qui veulent tenter leur chance à titre individuel, c’est plus difficile: le cadre légal est compliqué, la situation parait confuse, les indices donnés sont opaques et l’expatriation reste angoissante. A première vue, la Russie n’a rien de rationnel. Il est difficile de se faire une idée du marché du travail russe.

En 2010 le salaire moyen en Russie se montait à environ 22.700 roubles nets (soit 570 euros), avec certaines disparités régionales comme on peut le constater ici. A titre de comparaison, le salaire mensuel net moyen se monte en Pologne à 610 euros, en Roumanie à 325 euros, en Bulgarie à 310 euros, en Chine à 300 euros, et en Ukraine et Biélorussie à 250 euros. L’objectif que la Russie a fixé est d'atteindre dans les 3 ans est un salaire moyen de 800 euros, 800 euros étant déjà aujourd’hui le salaire moyen à Saint-Pétersbourg.  Je précise qu’en Russie on parle de salaire moyen déclaré, quand encore souvent, une partie du salaire ne l’est pas. On parle aussi toujours de salaires nets, impôts et charges sociales déjà déduits, ce qui signifie que les valeurs réelles sont plus élevées que les chiffres donnés. Comme Saint-Pétersbourg, Moscou est sans doute la meilleure façon d’arriver sur le marché du travail, pour la simple raison que la région de Moscou représente 20% du PIB du pays, mais aussi parce que la plupart des grandes sociétés internationales y sont représentées. Par exemple, on dénombre en Russie près de 400 sociétés françaises et 4.000 sociétés allemandes qui ont presque toutes des représentations à Moscou.

Les fortes perspectives de croissance de l’économie russe pour les prochaines années et le dynamisme du marché intérieur font de la Russie une zone à très fort potentiel pour les sociétés européennes, surtout depuis que la crise a profondément grippé la croissance de la zone euro. Le salaire moyen à Moscou est de 43.000 roubles nets (1.040 euros) mais pour des jeunes spécialistes les salaires sont à des niveaux "européens" et le taux de chômage y est quasi nul, 1% par rapport à 6,3% pour le taux moyen en Russie. Quand aux possibilités de trouver du travail, la région de Moscou offre une situation idéale.

Si vous souhaitez tenter votre chance en tant que francophone en Russie, sachez qu’il y encore très peu de Français en Russie : environ 8000, dont 6.600 enregistrés de façon permanente. Les français sont principalement à Moscou, mais également dans la circonscription Nord-Ouest (400), dans le pôle industriel de Kalouga (120), dans la région de Rostov-Krasnodar (100 personnes) et enfin dans l’Oural principalement à Iekaterinbourg (40 personnes).

Enfin sachez que Monster n’est pas le site de recherche d’emploi principal en Russie, il vaut mieux consulter le célèbre site hh.ru! Vous pouvez vous y inscrire et tenter votre chance en mettant votre CV en ligne, face  aux dizaines de milliers d’offres d’emploi  qui s’y trouvent … Bonne chance en Russie!

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction.

* Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un "autre regard sur la Russie". Il collabore également avec l'Institut de Relations Internationales et Stratégique (IRIS), l'institut Eurasia-Riviesta, et participe à diverses autres publications.

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