La Libye à nouveau sans premier ministre

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Les autorités libyennes continuent de montrer leur faiblesse. Alors que le pays est déchiré par une crise politique qui dure déjà depuis plus de deux ans, le premier ministre par intérim Abdallah al-Theni a donné sa démission, reconnaissant son incapacité à remédier au chaos, a écrit le quotidien Nezavissimaia gazeta.

Les autorités libyennes continuent de montrer leur faiblesse. Alors que le pays est déchiré par une crise politique qui dure déjà depuis plus de deux ans, le premier ministre par intérim Abdallah al-Theni a donné sa démission, reconnaissant son incapacité à remédier au chaos, a écrit le quotidien Nezavissimaia gazeta.

Seules les concessions significatives des rebelles qui contrôlaient les ports pétroliers à l'est du pays ont permis de commencer à débloquer le principal secteur d'exportations. Le procès de l'élite du gouvernement Kadhafi, dont deux fils de l'ex-dirigeant, s'est par ailleurs ouvert à Tripoli.

Al-Theni a déclaré qu'il ne souhaitait pas être la cause d'un "conflit armé entre les nombreux groupuscules en lutte pour le pouvoir", selon des propos rapportés par le Guardian.

"La Libye subit le chaos et le pouvoir des insurgés", a-t-il ajouté. Al-Theni a été désigné premier ministre par intérim le 11 mars 2014 après la démission de son prédécesseur Ali Zeidan, dont il était alors ministre de la Défense.

La démission d'Al-Theni a été annoncée après une attaque armée contre son domicile samedi dernier. D'après l'ex-premier ministre, les auteurs de l’assaut pourraient être des groupes armés clandestins libyens. Une partie d'entre eux travaille dans les structures de force de l'Etat depuis le renversement de Mouammar Kadhafi en novembre 2011, l'autre a préféré démarrer une vie pacifique. Depuis trois ans ces groupes affichent leur indépendance et représentent une véritable menace à la sécurité nationale.

En un mois de travail, Al-Theni avait réussi à lever le blocus de deux ports pétroliers à l'est de la Libye, contrôlés par des rebelles exigeant l'autonomie de la Cyrénaïque riche en pétrole car Tripoli s’adjugeait toutes les recettes des exportations pétrolières. Ils avaient commencé à vendre eux-mêmes leur pétrole mais cette tentative avait été déjouée. Le pétrolier Morning Glory, naviguant sous pavillon nord-coréen et transportant du pétrole pour 36 millions de dollars, avait fui les corvettes militaires libyennes : il a été intercepté par les forces spéciales de la marine américaine, arrêté et remis aux autorités. Au même moment Tripoli avait envoyé des chars dans l'est du pays. Les rebelles ont accepté de négocier à condition d'abandonner cette opération militaire. Le gouvernement était représenté lors des discussions par le premier ministre en personne. Face à lui : Ibrahim Jadran, "Robin des Bois" local connu pour son incorruptibilité : les autorités avaient tenté de lui remettre en septembre dernier un chèque de 24 millions de dollars pour débloquer les ports. En colère, il avait refusé le pot de vin et dévoilé cette histoire à la presse.

Grâce à la nouvelle entente, Jadran a obtenu la libération de trois hommes interpelés pendant l'arrestation du pétrolier Morning Glory, des indemnités financières pour les rebelles armés qui avaient déserté la sécurité des ports, l'amélioration du suivi des ventes de pétrole et la promesse de lutter contre la corruption. Les ports Es Sider et Ras Lanouf demeurent sous le contrôle des rebelles. Selon le ministre du Pétrole Omar Chakmak, ils seront libérés d'ici deux à quatre semaines après un nouveau dialogue.

Le blocus a considérablement affecté l'économie du pays : la production pétrolière au second semestre de 2013 avait chuté de 1,5 million à 250 000 barils par jours. En 9 mois, les pertes s'élevaient à 14 milliards de dollars. Le ministère du Pétrole a calculé que les recettes des exportations avaient diminué de 83%. Résultat des courses, Tripoli s'est retrouvé incapable de payer le salaire des fonctionnaires, y compris celui des unités armées au service du gouvernement. C'est une menace directe pour la sécurité du pays.

Les autorités libyennes ne parviennent pas à maîtriser les anti-kadhafistes armés alors que les procès des kadhafistes se succèdent. 38 hommes proches de l'ancien régime ont comparu hier devant le tribunal, répondant d’accusations de corruption, abus de pouvoir, meurtres, vols, détournements, sabotages, etc. Sur le banc des accusés figuraient Seïf al-Islam Kadhafi et Saadi Kadhafi, les fils de l'ex-dirigeant, ainsi qu'Abdallah al-Senoussi, ex-chef des services de renseignement, et Abdoul Ati al-Obeidi, ex-ministre des Affaires étrangères. La Cour pénale internationale avait demandé à la Libye l'extradition des fils Kadhafi à la Haye mais n'a pas suffisamment insisté. Car il ne faut pas compter sur l'objectivité du tribunal de Tripoli.

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