L'Union européenne pourrait préparer lundi un projet de réponse collective à la lettre que le président russe Vladimir Poutine a écrit aux dirigeants européens au sujet de l'Ukraine, écrit lundi le quotidien Novye Izvestia citant le chef de la diplomatie polonaise Radoslaw Sikorski.
Ce dernier avait en effet attiré l’attention des leaders européens sur le problème de la dette gazière de l'Ukraine et avait averti que la Russie pourrait bientôt imposer aux Ukrainiens qu’ils paient d’avance leurs approvisionnements en gaz. Le groupe russe Gazprom a pratiquement doublé le tarif du gaz pour son voisin depuis avril: il atteint désormais 485 dollars pour mille mètres cubes. Kiev refuse de payer ce prix, ce qui est susceptible de provoquer une nouvelle guerre du gaz russo-ukrainienne.
Selon certains experts, l'UE devra prendre partiellement en charge le fardeau de la dette de Kiev devant la Russie. L'UE conserve toutefois des leviers de pression sur Moscou, comme l'enquête antimonopole qui se poursuit à l'égard de Gazprom et l'éventuel blocage du gazoduc South Stream.
Le ministre polonais des Affaires étrangères a annoncé qu'à la demande du président de la Commission européenne José Manuel Barroso, les ministres des Affaires étrangères de l'UE préparaient pour lundi un projet de réponse à Vladimir Poutine. Selon Radoslaw Sikorski, il est notamment nécessaire de convenir d'un tarif "juste" du gaz et des conditions de transit du gaz russe via l'Ukraine dans les pays de l'UE.
Le porte-parole du président russe Dmitri Peskov avait déclaré plus tôt que Moscou était surpris par les discours des pays tiers, notamment des USA, sur la justice et l'injustice des tarifs gaziers pour l'Ukraine, tout en taisant le problème principal qu'est la dette de Kiev. Conformément aux accords convenus en décembre 2013, l'Ukraine payait au premier trimestre 268,5 dollars les mille mètres cubes de gaz russe.
A partir du 1er avril Gazprom avait annulé cette remise en portant le tarif à 385,5 dollars, car contrairement aux accords de décembre Kiev ne remboursait pas la dette ni payait ses livraisons courantes. L'annulation de la remise prévue par les accords de Kharkov de 2010 a été annoncée début avril – cette remise était accordée en échange du prolongement du stationnement de la flotte de la mer Noire en Crimée. Résultat des courses : le tarif a grimpé jusqu'à 485 dollars pour mille mètres cubes.
Pour justifier ces mesures à l'encontre de Kiev, Vladimir Poutine a expliqué aux dirigeants européens que la Russie ne devait plus et ne pouvait plus porter seule le fardeau du soutien de l'économie ukrainienne. "Il faut au plus vite procéder au stockage de 11,5 milliards de mètres cubes de gaz en Ukraine pour éviter les perturbations du transit de gaz, or cela nécessite près de 5 milliards de dollars", a écrit le président russe.
"C'est une impasse, étant donné que le Kremlin adopte une position intransigeante sur les tarifs. Par conséquent, les Européens devront très probablement aider Kiev à régler le problème de la dette devant Gazprom, sinon les Ukrainiens commenceront à voler le gaz et il n'arrivera pas jusqu'à l'Europe. L'UE voudrait éviter cette situation à tout prix", a déclaré Sergueï Karaganov du Haut collège d'économie et membre du Conseil pour les droits de l'homme auprès du président russe.
Moscou cherche aujourd'hui activement de nouveaux acheteurs de gaz pour devenir moins dépendante de l'UE et de l'Ukraine. Les négociations se poursuivent notamment avec Pékin mais selon certaines sources, les parties n'arrivent toujours pas à s'entendre car la Chine exige des remises conséquentes. Au final, aucun grand contrat n'a encore été signé.
