La Russie compte créer son système de paiement national, a déclaré hier Vladimir Poutine : "Cela demandera un certain temps mais au Japon et en Chine, ils fonctionnent très bien". Le président n'a pas donné plus de précisions, écrit vendredi le quotidien Vedomosti.
Des mesures peu coûteuses et compatibles techniquement avec les systèmes existants sont actuellement étudiées par la Banque centrale de Russie, selon les déclarations de sa présidente Elvira Nabioullina au forum de la Bourse de Moscou. "Les banques travailleront pendant un certain temps grâce à un réseau d’hébergeurs pour traiter les opérations entre les partenaires connectés", déclare le haut responsable d'une banque russe. Cependant, ce réseau ne pourra pas être efficient pendant une longue période, d'autant que seuls les principaux acteurs du marché pourront le rejoindre - et pas toutes les banques. Selon les estimations de la Banque centrale, 90% des paiements par carte bancaire en Russie concernent des opérations intérieures.
Les systèmes de paiement Visa et MasterCard ont bloqué vendredi dernier les opérations des cartes émises par les banques dont Iouri Kovaltchouk et les frères Boris et Arkadi Rotenberg sont copropriétaires. Ces hommes d'affaires et la banque Rossia ont été inscrits jeudi sur la liste noire du Bureau de contrôle des actifs étrangers (OFAC) des Etats-Unis. En même temps, les cartes de la banque SMP ont été débloquées dimanche sur autorisation de la Maison blanche.
Après cela, des amendements à la loi sur le système de paiement national ont été soumis à la Douma (chambre basse du parlement russe). Le projet en question propose d'interdire l'installation de centres d'opération et de paiement pour "assurer la stabilité des opérations" en Russie.
Elvira Nabioullina a déclaré que les réflexions portaient actuellement sur la méthode : faut-il créer un système de paiement national à partir de zéro ou utiliser les structures des banques commerciales ? "Il faut simplement évaluer dans quelle mesure cela répond aux meilleurs standards sur le plan financier". Elle a ajouté qu'il n'était pas question de renoncer aux systèmes de paiement internationaux Visa et MasterCard qui représentent 95% du marché des cartes de paiement.
Dans un premier temps le système de paiement national pourrait être soutenu par le budget fédéral. "Dommage que certaines compagnies aient décidé d'adopter de telles restrictions. Je pense que cela entraînera simplement la perte de certains segments du marché – très rentables, d'ailleurs", a constaté Vladimir Poutine en ajoutant que "ce n'est pas une décision de la Russie : elle doit protéger ses intérêts et elle le fera".
Le flux monétaire qui pourrait être injecté dans le futur système de paiement national par l'Etat dépasse 4 000 milliards de roubles (environ 80 milliards d'euros). La commission des systèmes de paiement d'une banque émettrice avoisine 0,1%, déclare un responsable bancaire. De cette manière, 80 milliards d'euros pourraient rapporter un profit de 80 millions d'euros.
Le président de Sberbank Guerman Gref a déclaré la semaine dernière que ce système pouvait être créé en deux mois sur la base du système PRO100. Cependant, des représentants de banques commerciales indiquent que cette technologie n'a pas réussi à se répandre. Lors de leur réunion avec Elvira Nabioullina, les banquiers ont proposé de créer un centre de paiement qui serait contrôlé par les plus grands acteurs sans être rattaché à une banque concrète. Cette idée avait déjà été suggérée par la Banque centrale, mais son représentant a reconnu que l’institution n'était pas encore techniquement prête.
