Erdogan sur la sellette

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La lutte pour le pouvoir en Turquie s'intensifie en prévision des élections régionales, législatives puis de la première élection présidentielle au suffrage universel en 2014. La situation dans le pays est extrêmement tendue, écrit lundi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

La lutte pour le pouvoir en Turquie s'intensifie en prévision des élections régionales, législatives puis de la première élection présidentielle au suffrage universel en 2014. La situation dans le pays est extrêmement tendue, écrit lundi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

Le récent scandale de corruption impliquant les proches collaborateurs du premier ministre a déjà fait chuter la monnaie nationale. Il est une manifestation flagrante de la lutte pour le pouvoir en cours dans le pays.

Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a menacé d'expulser du pays certains ambassadeurs pour ce qu’il considère comme des " provocations". Il n'a pas précisé de quels diplomates il s’agissait mais l'ambassade des Etats-Unis a déjà annoncé sur Twitter qu'elle n'était pas impliquée dans l'opération anticorruption en cours dans le pays et qu'elle aspirait à l'amitié et la coopération avec la Turquie.

Le 17 décembre, la Direction turque de la alutte contre les crimes financiers a lancé une spectaculaire opération anticorruption. D'après la chaîne américaine CNN, près de 90 personnes ont été interpelés à Ankara et Istanbul, dont 66 ont été convoquées au tribunal samedi dernier. Certaines d'entre eux ont été relâchées sous caution. 24 hauts fonctionnaires ont été inculpés pour corruption dont Baris Güler, fils du ministre de l'Intérieur Muammer Güler, et Kaan Caglayan, fils du ministre de l'Economie Zafer Caglayan.

Le procureur général a ouvert une enquête contre les ministres en demandant au parlement de lever leur immunité. Les enquêteurs ont également perquisitionné les bureaux de la banque nationale Halk bankasi et d'une grande société du bâtiment, dont le personnel suspect était placé sous surveillance depuis près d'un an. Les personnes arrêtées sont accusées de corruption, de trafic d'or et de blanchiment d'argent. La télévision diffuse même les images des cartons de chaussures remplis d’argent retrouvés pendant les perquisitions.

C'est la première fois qu'un scandale de corruption de cette ampleur éclate dans le pays depuis l'arrivée au pouvoir d'Erdogan (2002). Et jamais aucun problème de ce genre n’avait touché l’entourage proche du premier ministre.

Selon la presse, le milliardaire turc Fethullah Gülen résidant aux USA, ancien collaborateur d'Erdogan au parti de la justice et du développement (AKP) et partisan de l'islam radical, serait derrière ces révélations. Il a, à plusieurs reprises ,aidé l'AKP où il avait beaucoup de partisans à remporter les élections.

Gülen a également dirigé le mouvement Hizmet, qui s'occupe de la construction d’écoles privées, d’universités, d’hôpitaux et organise des fonds de charité. Ses partisans occupent des postes à responsabilité dans la police et la communauté judiciaire.

Le conflit entre Gülen et Erdogan s'est aggravé en novembre quand le premier ministre a annoncé qu'il voulait fermer les écoles appartenant au mouvement Hizmet. Gülen a publié sur son site une vidéo accusant le gouvernement d'ignorer les véritables problèmes.

Le quotidien turc Hurriyet remarque qu'Erdogan et Gülen se ressemblent beaucoup. Les deux sont partisans du renouveau néo-ottoman et ont combattu aussi bien les kémalistes que le pouvoir militaire. Après leur victoire ils avaient trouvé des prétextes pour se lancer des reproches mutuels.

Les analystes pensent qu'à trois mois des élections régionales du 30 mars et à six mois de la présidentielle, Gülen cherche à saper les positions d'Erdogan, qui voudrait devenir un chef de l'Etat élu par le peuple. L'avocat du milliardaire a déclaré que son patron n'était pas impliqué dans l'enquête et qu'elle ne l'intéressait pas du tout.

Pendant ce temps, la lire turque a chuté plus bas que jamais, en passant même en-dessous de son minimum de l'été dernier. Le vice-premier ministre Bülent Arinç a promis : "Nous avons toujours respecté les décisions de justice et n'entraverons d'aucune manière l'enquête".
Les membres de l’entourage d'Erdogan sont conscient que s'ils renonçaient à l'enquête, ils ne pourraient jamais laver le parti des accusations de corruption. L’image de l'AKP est sur la sellette.

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