Risque d'explosion sociale en Biélorussie

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Les ouvriers de plusieurs entreprises de Minsk sont en grève contre le retard des salaires et la suppression de nombreux emplois, écrit mercredi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

Les ouvriers de plusieurs entreprises de Minsk sont en grève contre le retard des salaires et la suppression de nombreux emplois, écrit mercredi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

Les chefs d'entreprise n'excluent pas un risque d'explosion sociale bien que les sociologues ne partagent pas cet avis. La hausse de la tension sociale est flagrante mais elle ne risque pas encore provoquer des rassemblements massifs.

Les habitants de Minsk parlent depuis deux jours de la grève à l'usine Belvar au centre-ville, où les travailleurs protestent contre le non versement des salaires et les plans de la direction qui veut réduire le nombre de postes. Cette dernière expliquait lundi aux journalistes que rien d'exceptionnel ne s'était produit au sein de l'entreprise et qu'elle avait encore le temps de verser les salaires, à savoir le 25 novembre. Cependant, il a été annoncé le 26 novembre que dans le meilleur des cas les paies seraient versées à la fin de la semaine. Les ouvriers témoignent du fait que la direction s'efforce de les persuader de travailler. On en ignore la raison : l’entreprise ne vend presque rien.

Belvar produit des hachoirs à viande, des broyeurs, des cuiseurs vapeur, des mixeurs et des fers à repasser mais le marché déborde aujourd’hui de produits identiques, fabriqués à l'étranger et à bas prix. Les marchandises biélorusses, qui sont loin d'être bon marché et dont la qualité laisse à désirer, ne se vendent donc pas.

C'est aussi pour ça que la semaine de travail a été réduite chez Horizont, qui fabrique des postes de télévision, des fours à micro-ondes et des aspirateurs. Pour la même raison l'entreprise avait déjà supprimé des postes et réduit la semaine de travail au printemps dernier. A l'époque la direction avait expliqué ces mesures par la saisonnalité. Il s'avère finalement que "ce n'est jamais la saison", ironisent les observateurs locaux.

Des nouvelles inquiétantes arrivent également d'autres régions. En particulier, le site internet de Moguilev rapporte que Strommachina ne paie pas ses travailleurs. Cette usine fabrique des grues sur pylône et des équipements servant à produire des matériaux de construction.

L'économie biélorusse connaît également des problèmes dans d'autres secteurs. Les chauffeurs de taxi de Minsk menacent d'organiser une manifestation en raison de l'interdiction d'augmenter leurs tarifs. A une époque le Comité exécutif de Minsk avait signé des accords avec tous les services de taxi pour maintenir les tarifs inchangés jusqu'à l'été 2014. Ces mesures ont été prises en prévision du Championnat du monde de hockey qui se tiendra en Biélorussie en mai prochain. Cependant, les chauffeurs de taxi affirment qu’ils sont incapables aujourd’hui de couvrir leurs frais d'essence et d'entretien suite à la hausse des prix, alors même qu'une nouvelle augmentation est attendue à partir de janvier 2014.

Les services sociologiques auraient pu constater une hausse de la tension sociale… s’ils n’étaient pas fermés. Seul l'Institut indépendant d'études socioéconomiques et politiques déplacé en Lituanie donne une idée de mœurs sociales en Biélorussie. Selon cet institut, 51,3% des Biélorusses s'accordent à dire que "la vie est difficile mais supportable". Elle est insupportable pour 18% des personnes interrogées, qui disent se démener pour survivre. En particulier, 55% font des heures supplémentaires et travaillent "à côté". Plus de 60% suivent attentivement le cours monétaire et plus de 70% attendent une dévaluation. Les experts économiques estiment le niveau de l'économie souterraine en Biélorussie à 30% - ce qui est pour la population un moyen de s'en sortir.

La fameuse tolérance des Biélorusses ne se manifeste pas uniquement dans leur aptitude à supporter, mais aussi dans le fait qu'ils n'associent pas la détérioration de leur niveau de vie à la personnalité du président Alexandre Loukachenko. Les sondages de l'Institut indépendant d'études socioéconomiques et politiques montrent que sa popularité est de 46,7% (contre 48,9% en juin). Les experts expliquent ce phénomène par la structure du système de formation de l'opinion publique. Dans ces circonstances, même avec la hausse du mécontentement social, les experts ne prédisent pas de manifestations de masse qui menacerait le pouvoir de Loukachenko.

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