L'ex-agent du renseignement américain Edward Snowden s'est vu accorder hier l'asile en Russie pour une durée d'un an après avoir passé plus d'un mois dans la zone de transit de Cheremetievo. Le congrès américain considère la décision des autorités russes comme une "gifle démonstrative à tous les Américains" et la preuve de la "fin du redémarrage". La Maison blanche a officiellement confirmé que l'octroi de l'asile à Snowden se répercuterait directement sur les plans de Barack Obama de rencontrer Vladimir Poutine en septembre à Moscou, écrit le vendredi 2 août le quotidien Kommersant.
L'octroi de l'asile – valable jusqu'au 31 juillet 2014 – à Snowden en Russie a été annoncé hier par son avocat Anatoli Koutcherena. D'après lui, l'ex-agent de la CIA a quitté avec lui la zone de transit de Cheremetievo, après quoi il a fait prendre au fugitif un taxi. L'avocat n'a pas révélé la destination de Snowden pour des raisons de sécurité.
Le député russe Viatcheslav Nikonov a expliqué les motivations de Moscou : "La Russie aurait perdu la face en prenant toute autre décision. Si la Russie n'avait pas accordé l'asile à Snowden, on aurait cessé de prendre la Russie au sérieux, et les Américains auraient été les premiers à le faire". Quant au Kremlin, il a cherché hier à minimiser l'importance de l'événement : le conseiller du président russe Iouri Ouchakov a déclaré que l'affaire Snowden n'était pas suffisamment importante pour affecter les relations russo-américaines.
Mais Washington n'est pas de cet avis. Le porte-parole du président américain Jay Carney a officiellement confirmé que la décision des autorités russes se répercuterait directement sur les plans d'Obama de rencontrer Poutine à Moscou à la veille du sommet du G20 en septembre. "Pour l'instant, je n'ai pas d'informations concernant un changement dans le planning du président, mais les derniers événements pourraient nos pousser à revoir nos plans pour la préparation du sommet", a-t-il déclaré.
Les sources proches de l'administration américaine sont unanimes : la Maison blanche est susceptible d'annuler la rencontre au sommet à Moscou. "Depuis un mois, Washington laissait entendre à plusieurs reprises que la visite d'Obama à Moscou pourrait ne pas avoir lieu.
La décision de Moscou ne nous laisse pas d'autre choix", a expliqué une source. Cependant, la Maison blanche n'a pas l'intention d'aller jusqu'à l'escalade et d'annuler également la visite d'Obama à Saint-Pétersbourg pour le G20.
Néanmoins, les experts américains pensent que la décision d'annuler la rencontre à Moscou serait une "mesure sans précédent". "Rien de tel ne s'est produit depuis la Guerre froide", affirme Angela Stent, ex-agente de la NSA et professeur à l'université de Georgetown.
"Cette action de la Russie et un signe d'irrespect et une tentative délibérée d'humilier les USA. C'est une gifle pour tous les Américains", a déclaré hier le sénateur républicain John McCain qui a appelé l'administration d'Obama à "revoir en profondeur" les relations avec Moscou. Et la sénatrice Kelly Ayotte a qualifié cet événement de "fin du redémarrage".
"Les Etats-Unis ont montré à quel point il était important pour eux de traduire Snowden en justice. Il suffirait de rappeler l'incident avec l'avion du président bolivien, déclare Samuel Charap de l'Institut international de recherche stratégique (IISS). En refusant de coopérer dans cette affaire, les autorités russes envoient un signal clair : ce qui vous préoccupe n'est pas très important à nos yeux, et nous ferons exactement le contraire. Le président américain ne dialoguera pas et ne travaillera pas activement avec de tels pays."
