Les USA poussent l'Europe vers la guerre

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Garantir militairement le calme sur le Vieux continent: pour les uns, cet objectif s'est aujourd'hui transformé en paranoïa, pour les autres il est un commerce lucratif.

Après la résolution antirusse 758, adoptée récemment par le Congrès américain, Barack Obama a signé le 18 décembre une nouvelle loi prévoyant des sanctions supplémentaires contre Moscou et une aide militaire pour l'Ukraine: Ukraine Freedom Support Act of 2014, qui constitue un nouveau pas vers l'escalade du conflit en Europe. Autre tendance de plus en plus visible: l'Ukraine est poussée vers le rôle de kamikaze européen, sacrifié sur l'autel des intérêts de Washington.      

Un coup double contre l'Europe

Les États-Unis continuent de construire la base législative pour faire éclater une guerre en Europe, malgré l'inquiétude de leurs alliés européens face à l'état de leur économie et l'axe actuel de développement étatique de l'Ukraine, qui mène le pays dans l'impasse. 

A première vue, les États-Unis font face à de nombreux problèmes intérieurs, notamment à des contestations dans la ville de Ferguson et à une spirale de violente lutte des classes. Mais les deux chambres du Congrès et le président ont d'autres objectifs prioritaires: l'aide militaire à l'Ukraine (350 millions de dollars pour les trois années à venir), l'opposition à la propagande russe dans les pays de l'ex-URSS (10 millions de dollars annuellement pendant les trois prochaines années), le "soutien de la démocratie en Russie" (20 millions de dollars chaque année pendant trois ans), les sanctions contre les entreprises russes de défense… autrement dit, le renforcement de la stabilité en Ukraine, en Moldavie, en Géorgie et en Syrie. En outre, cette loi prévoit l'octroi à l'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie du statut de partenaires spéciaux hors Otan Sans que les Européens soient consultés…

L'activité législative américaine à l'extérieur de son territoire, la solidarité antirusse de l'Union européenne, la volonté fataliste de l'Ukraine de faire la guerre jusqu'à la victoire et les autres événements géopolitiques de 2014 illustrent clairement le fait suivant: malgré le fait que le mur de Berlin ait été depuis longtemps démoli, le soi-disant "redémarrage" des relations à l'Occident n'a pas eu lieu en réalité. Les chars otaniens poursuivent par inertie leur mouvement vers l'est, alors que les hommes politiques tentent de trouver des explications à ce paradoxe en Russie.

Le ministère russe des Affaires étrangères a condamné sans appel ce chantage politique. Mais l'envergure du problème dépasse le niveau des sanctions. 

L'envie de mourir au combat

En 1990, lors d'une rencontre avec des dissidents soviétiques, le sénateur français Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur au gouvernement de Jacques Chirac et impliqué dans plusieurs affaires pénales, s'est indigné: "Votre Gorbatchev, que fait-il? Nous avons coexisté dans une Europe divisée pendant près d'un demi-siècle et cela n'a vraiment gêné personne. Nous considérions cette division comme un fait établi car elle assurait la stabilité pour tout le monde. Chaque partie savait parfaitement ce qu'elle pouvait attendre de son adversaire, c'était convenable pour tous. Nos relations étaient parfaitement prévisibles. Votre perestroïka s'y est mêlée, mettant tout sens dessus-dessous. A quelles catastrophes faut-il s'attendre demain? Et comment y réagir? Nous n'en avons plus aucune idée".       

Cette logique du sénateur français peut éclairer beaucoup de choses. Tout ce qui se passe en Europe depuis un quart de siècle et aujourd’hui en Ukraine pourrait s'expliquer par l'égocentrisme hédoniste des dirigeants occidentaux - mais cette formule ne peut pas recouvrir la folie suicidaire du continent et des USA. Pendant toutes ces années, l’Occident a voulu se protéger contre une menace inexistante.         
Cette garantie militaire du calme européen s’est transformée en paranoïa pour les uns et en commerce lucratif pour les autres. Sans litiges politiques ni menaces réelles, l’Otan était effectivement vouée à périr lentement: l’Europe sait compter son argent. La rémission des uns et le bien-être des autres nécessitait des mouvements tout à fait concrets: une ceinture de conflits militaires, des bases otaniennes près de frontières russes, l’élimination continue de l’identité russe "irrationnelle".  

Les héritiers de Charles Pasqua

L’Occident n’a jamais eu envie de faire sérieusement la guerre. Mais cet élargissement "sans contact" de l’Otan vers l’est s’est logiquement heurté à la "ligne rouge" des intérêts nationaux de la Russie. Ce processus a provoqué des bouleversements et des révolutions de couleur. Et tout le monde a dû mettre la main à la poche pour envoyer les Ukrainiens au combat aux frais de tous.

Pourtant, l'Ukraine n'a pas touché d'argent liquide. Car il n’est pas certain que tous les Ukrainiens se croient désormais défenseurs de l’Union européenne et des États-Unis. La Grande Bretagne, les USA, la France, la Slovaquie, la Norvège et le Danemark ont récemment envoyé aux militaires ukrainiens des uniformes d’hiver, des médicaments, des équipements techniques, des gilets pare-balles, des générateurs électriques et des rations. Leur prochain pas serait logiquement la livraison d’armes offensives voire d’armement nucléaire tactique.

L’Occident n’arrive toujours pas à comprendre que ce n’est pas seulement la Russie, mais aussi tous les héritiers de Charles Pasqua qui se trouvent actuellement dans une situation très difficile. Il n'y a pas, aujourd'hui, d'analyse géopolitique objective de la situation, tout comme il y a 25 ans. Toutes les décisions politiques sont adoptées par le Congrès américain. En fin de compte l’Europe obtiendra ce qu’elle mérite – ce qui arrive quand on tente de briser un mur de pierre avec sa tête.

Mais l’Amérique pourrait également souffrir par effet de ricochet. Car il est impossible de résoudre des problèmes compliqués avec des moyens simplistes.     

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