La Lituanie devrait être admise dans la zone euro dès le 1er janvier 2015. La Commission européenne a fait cette recommandation au conseil des ministres des pays de l'Union Européenne. L'examen de cette question aura lieu au sommet fin juin. Cependant, il vaut mieux ne pas pronostiquer d’avance une décision positive sûre : les anciens membres de l’UE sont de plus en plus méfiants à l’égard des nouveaux membres.
La Lituanie se prépare à changer le litas contre l'euro. La plupart des habitants sont assurés que tôt ou tard, cela arrivera quand même. À vrai dire, tous ne sont pas optimistes : un Lituanien sur trois n'approuve pas le changement de monnaie, et un Lituanien sur dix n’a jamais vu d’euros. Tels sont les résultats du sondage de l'opinion publique Eurobaromètre organisé par la Commission européenne. Le chef de la direction du service des Pays Baltes du centre de politologie Nord-Sud Sergei Rekeda explique :
« Le problème principal de l'appartenance à l'Union Européenne pour les républiques baltes est la dépopulation, parce qu’une quantité non négligeable de gens partent travailler à l’étranger. Et dans les pays baltes, on n’a pas réussi à atteindre un niveau de vie économique égal à celui de la « vieille Europe». Et dans l'immédiat, il ne sera pas atteint, parce que leur position au sein de l’UE sur le plan stratégique ne prévoit pas cette comparaison. Pour l’UE, c’est une source de main d’œuvre, elle ne tient pas du tout à développer leur économie.»
À vrai dire, les pays baltes sont considérés en Union Européenne non seulement comme une source de main d’œuvre bon marché, mais aussi comme une sorte de zone tampon entre la Russie et l'Europe. C’est ce qu’on croit aussi à Washington, dit le rédacteur en chef de l'hebdomadaire Courrier Lituanien Anatoly Ivanov.
« Ce cordon sanitaire est nécessaire pour avoir quelqu’un qui tire l'ours par la queue. Nous sentons cela constamment : le flux de touristes diminue, on réduit le flux de produits lituaniens en Russie, on ne sait pas ce qui arrivera aux frets russes transitant par Klaïpeda. Tout cela se répercute sur nous parce que nous sommes intégrés dans l'économie de la Russie, que nous le reconnaissions ou non. Nous vivons en voisinage, et il n’est pas bien de se quereller avec ses voisins.»
Mais la politique intérieure des pays baltes est construite, dans une certaine mesure, sur une rhétorique antirusse. En Lettonie, sur fond de la crise ukrainienne, la popularité des partis antirusses de la droite grandit. Malgré tout, le parti Unité, qui représente les intérêts de la population russophone du pays, reste toujours la force politique la plus populaire. La Lituanie cherche activement un moyen de devenir indépendante de la Russie en matière de gaz. Les négociations sur les livraisons du gaz liquéfié avec la compagnie norvégienne Statoil sont pratiquement terminées.
Le déficit énergétique de la région et le reflux constant de population ont provoqué la stagnation dans la vie économique et politique du pays. Et des améliorations ne sont pas attendues dans un proche avenir, considère Sergei Rekeda.
« Si une nouvelle vague de crise commence en UE, probablement, les tensions sociales monteront, ce qui provoquera ensuite une explosion sociale. C’est que, au fond, la Lituanie et la Lettonie ne se sont pas complètements remises après la crise de 2008. »
Pour le moment, en périphérie de l'Union européenne, tout est stable : le niveau de vie est deux fois plus bas que chez les anciens membres, le reflux de population est élevé. Et la stratification sociale devient de plus en plus apparente : au cours de cinq premières années qui ont suivi l’adjonction de la Lettonie à l’UE, le taux de la population extrêmement pauvre a augmenté de 1,5 fois.
