L'Allemagne prête à tenir son nouveau rôle dans le monde

© RIA Novosti . Tatyana FirsowaL'Allemagne prête à tenir son nouveau rôle dans le monde
L'Allemagne prête à tenir son nouveau rôle dans le monde - Sputnik Afrique
S'abonner
Chaque pays est ressorti de la conférence sur la sécurité de Munich, ce week-end, avec un sentiment différent. Certains ont pu penser que les 20 chefs d'Etat et de gouvernement et 60 ministres des Affaires étrangères et de la Défense étaient venus à Munich uniquement pour parler de l'Ukraine.

Chaque pays est ressorti de la conférence sur la sécurité de Munich, ce week-end, avec un sentiment différent. Certains ont pu penser que les 20 chefs d'Etat et de gouvernement et 60 ministres des Affaires étrangères et de la Défense étaient venus à Munich uniquement pour parler de l'Ukraine.

En effet certains en ont parlé et l'ordre du jour initial a été élargi d'urgence à cet effet. En réalité, la Syrie aurait dû tenir la première place mais tout le monde avait déjà conscience que la situation syrienne était en cours de stabilisation, même si cette dernière est lente. Alors quel était le thème numéro un à Munich? De mon point de vue : l'Allemagne et son nouveau rôle éventuel dans le soutien de la sécurité atlantique - un "éléphant" que certains ont du mal à remarquer parce que ce thème était trop important à Munich, trop clairement à la première place, aussi bien en théorie qu’en pratique.

L'Allemagne prête à prendre des responsabilités

Lors de son discours d'accueil, le président allemand Joachim Gauck a donné le ton de l'événement : "Pour être bref, je voudrais parler du nouveau rôle de l'Allemagne dans le monde". Il a poursuivi : "A une époque où les Etats-Unis ne peuvent plus donner toujours plus, l'Allemagne et ses partenaires européens doivent devenir responsables de leur propre sécurité".

Nous reviendrons plus tard à cette idée des USA qui "ne peuvent plus". Pour l'instant, voyons ce qui a été dit par d'autres Allemands, qui n’étaient pas plus nombreux que d'habitude mais ont fait entendre leur voix.

La ministre de la Défense Ursula von der Leyen, par exemple, a évoqué le même sujet. Elle a rappelé le rôle particulier de l'Allemagne dans la fin de la guerre en Afghanistan, déclaré que la crise financière avait poussé de nombreux Européens à adopter des réformes dans le secteur de la défense (c'est-à-dire réduire les dépenses). Les Européens doivent chercher ensemble les réponses aux nouveaux défis et l'Allemagne est prête à endosser une plus grande responsabilité internationale – y compris la participation aux opérations militaires européennes au Mali et en Centrafrique.

Parmi les dirigeants allemands, seul le ministre des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier a mentionné l'Ukraine, tandis que le Mali était sur toutes les lèvres.

Gauck, qui n'est pas la plus grande figure de la politique allemande, est brièvement devenu une célébrité médiatique et tout le monde a cité son discours. Parmi les appréciations du forum de Munich, celles des Américains sont les plus intéressantes car ils ont très activement participé à l'histoire de Munich.

Depuis sa création il y a exactement 50 ans, la conférence de Munich ne concerne pas la sécurité en général et s'occupe des problèmes de sécurité dans l'espace transatlantique, qui ne comprend pas seulement l'Europe mais aussi les Etats-Unis.

Une soif de "renaissance transatlantique"

Les Allemands n'ont pas lancé de défi aux USA, au contraire. Le ministre Steinmeier a mentionné à Munich les appels officiels des Américains adressés à l'Allemagne, qui lui demandent d'agir en conformité avec son statut en Europe. Mais les élites allemandes sont aussi déçues par les USA, après le scandale des écoutes des conversations téléphoniques d'Angela Merkel par les renseignements américains. Les Allemands en ont conclu qu’ils avaient besoin de leur propre politique étrangère, plus forte.

Il ne faut pas croire pourtant que le duo américain – le secrétaire d'Etat John Kerry et le chef du Pentagone Chuck Hagel – était venu à Munich pour dissuader les Allemands de prendre leur autonomie. Au contraire, la proclamation du "nouveau rôle" de l'Allemagne à long terme semble avoir été planifiée entre les gouvernements des deux pays. Et l'histoire des écoutes a contribué au processus, au lieu de l'empêcher.

En fin de compte la situation actuelle est tout simplement absurde : les USA commencent ou tentent de provoquer des guerres, pendant que leurs alliés européens s'y opposent toujours plus à chaque fois et ne possèdent plus le potentiel militaire nécessaire. Du coup, les USA sont fatigués, et l'Europe…

Ces derniers temps, a-t-elle souvent joué un rôle décisif dans les épisodes internationaux importants sortant du cadre régional? Pas qu'on s'en souvienne. De telles partenaires n'ont pas besoin l'un de l'autre.

Par conséquent, Kerry et Hagel ont très activement participé aux discussions à Munich sur la nouvelle Allemagne, appelant à la "renaissance transatlantique" nécessaire pour parer les défis et les risques contemporains, du changement climatique à l’effondrement des pays africains.

En fait, la renaissance du partenariat atlantique grâce au renforcement de l'Allemagne pourrait bien être la seconde grande nouveauté de la politique étrangère américaine après le changement radical de cap au Moyen-Orient, notamment dans son dialogue avec l'Iran.

D'ailleurs John Kerry s'est entretenu à Munich avec le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif. Il y a six mois une telle rencontre aurait été un scoop international, alors qu'elle semble anodine aujourd'hui.

Mais nous avons oublié le scandale des écoutes : qu'en fait-on? C'est très simple. Une discussion a été organisée à Munich sur les défis du monde informatique et l'avenir des renseignements. Il a été dit que les renseignements recueillaient bien plus d'informations qu'ils ne pouvaient analyser, et qu'il fallait établir une coopération entre les alliés. Ce problème est très large et il faut le régler ensemble en organisant de longues consultations.

D'autres sujets ont été également abordés : la Serbie et le Kosovo, la Syrie, l'Iran (les Iraniens étaient présents), l'Ukraine (l'opposition était présente et se querellait avec les représentants du gouvernement).

Mais qu'en est-il du sujet numéro un – une Allemagne forte? Cela plaira-t-il à la Russie?

C'est un nouveau problème intéressant pour la politique étrangère future de la Russie. Il faudra définir ce qu'est une Allemagne forte. Est-ce une Allemagne qui a son propre point de vue, qui ne coïncide pas forcément avec celui de la Russie et/ou des Etats-Unis? Ce serait normal dans un monde depuis longtemps multipolaire - mais loin d'être toujours facile.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала