Pourquoi le monopole de Gazprom est-il en danger?

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Le producteur gazier indépendant Novatek, dont Guennadi Timtchenko est copropriétaire, cherche depuis l'automne dernier à lever le monopole de Gazprom sur les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL).

Les propriétaires de Novatek, producteur gazier indépendant, ont proposé de rompre le monopole de Gazprom sur les exportations du gaz liquéfié. De manière surprenante, cette proposition a été soutenue par le président de Rosneft, Igor Setchine. Que cache cette initiative ?

Le producteur gazier indépendant Novatek, dont Guennadi Timtchenko est copropriétaire, cherche depuis l'automne dernier à lever le monopole de Gazprom sur les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL). De manière surprenante, il a été soudainement rejoint par la plus grande compagnie pétrolière russe, Rosneft, et son président Igor Setchine mercredi dernier pendant la réunion de la commission présidentielle pour l'industrie énergétique. Rosneft s'apprête en effet à réaliser des projets d'envergure sur le plateau et s’intéresse aux exportations de GNL produit à cet endroit car il sera impossible de vendre ce gaz sur le marché national.

Une concurrence à l’étranger

Dès 2012, les producteurs indépendants ont commencé à presser Gazprom sur le marché national en proposant des conditions et des tarifs plus avantageux. Le géant gazier pouvait se permettre de fermer les yeux parce que le marché des exportations restait plus attractif et juridiquement rattaché à lui : en effet, les organisations qui souhaitent exporter des hydrocarbures doivent passer un accord avec Gazprom. En 2010 encore, Novatek avait signé avec Gazprom un accord pour exporter le GNL de son futur site à Yamal. Cependant dans le passé, Timtchenko rappelait régulièrement que le cofinancement du projet nécessitait des garanties pour les banques sous forme de contrats pour les exportations de GNL - et Gazprom ne s’est pas pressé pour en fournir à Novatek.

Ami, mais contre qui ?

Au cours de l’été 2012, des rumeurs ont circulé sur un conflit entre Setchine et Timtchenko.

A l'époque, les parties niaient toute tension mais les discussions de couloir se sont intensifiées lorsque la marque pétrolière Gunvor, dont Timtchenko est également copropriétaire, a perdu pour la première fois les appels d'offres sur les exportations de pétrole face à Rosneft, alors même qu'en octobre Setchine disait "soutenir le maintien du monopole de Gazprom sur les exportations de gaz" et que Rosneft était prête à coopérer avec le géant gazier pour exporter son propre gaz.

"Gazprom coordonne les exportations de gaz et nous soutenons ce schéma. Il est néfaste de changer cette structure car cela réduirait les ventes à l'étranger", avait déclaré Setchine à l'époque.

Autres rivages

Mais le 13 février, il a affirmé vouloir vendre lui-même son GNL. Le patron de Rosneft a déclaré que le gaz représentait près de la moitié des ressources de sa compagnie sur le plateau, soit environ 21 000 milliards de mètres cubes. D'après la loi, la compagnie doit l'extraire mais pour des raisons géographiques et financières le marché national ne peut pas l'absorber. Il ne reste alors qu'une solution – libéraliser les exportations de GNL pour les projets en eaux territoriales, sur le plateau continental et les péninsules de Yamal et de Gydan - où travaille Novatek.

Setchine a promis que la libéralisation des exportations du GNL ne porterait pas atteinte aux intérêts de Gazprom car ces livraisons seraient destinées aux marchés de la région Asie-Pacifique - si le gaz russe n'arrivait pas dans cette région, d'autres acteurs s'empareraient du marché.

Tous les chemins mènent en Europe

Mais le président russe Vladimir Poutine, premier à soulever le thème d'une éventuelle libéralisation des exportations de GNL, a soupçonné le président de Rosneft de vouloir ruser.
Il remarque que la Route maritime du Nord que la compagnie a l'intention d'emprunter pour exporter le gaz de la mer de Kara n'est disponible que 4 à 5 mois par an - même une flotte de brise-glaces est incapable de franchir la zone pendant 3 à 4 mois.

Le président craint donc que le gaz de Rosneft arrive sur le marché au comptant européen, où les prix sont souvent plus bas que les tarifs contractuels de Gazprom. Les exportations de Gazprom en Europe ont chuté de 7,5% l'an dernier et beaucoup d'experts l'expliquent par une politique tarifaire insuffisamment souple et la réticence de Gazprom à associer les tarifs des contrats à long terme au marché au comptant.

La bataille pour le consommateur

Même avec une figure aussi notable que Timtchenko, Novatek ne pourrait pas compter sur un changement de la législation à son avantage. Mais quand le fleuron du secteur pétrolier russe entre en jeu, les règles changent.

Setchine affirme que la Russie a déjà manqué beaucoup d'opportunités en raison des restrictions sur les exportations. "On assiste à une transformation des marchés… On se bat pour les consommateurs, il faut s'attendre à un nouvel élan vers l'industrie du GNL après la stabilisation des exportations par le Qatar ainsi qu'à l'apparition sur ces marchés de grands acteurs tels que les USA, l'Australie, le Canada et la Nouvelle Guinée. La Russie a déjà manqué beaucoup d'opportunités marchandes en raison des restrictions sur les exportations et le maintien de cette tendance pourrait affecter nos positions sur les marchés mondiaux", avertit-il.

Immédiatement après la réunion de la commission, Rosneft a signé un mémorandum avec l'américain ExxonMobil – les parties étudieront la possibilité de construire une usine de GNL en Extrême-Orient. Rosneft semble donc convaincue de son succès.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction


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