L'objectif du successeur d'Annan: arrêter la guerre en Syrie

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Très prochainement on connaîtra le nom du diplomate qui remplacera Kofi Annan et assumera les difficiles fonctions d'Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie.

Très prochainement on connaîtra le nom du diplomate qui remplacera Kofi Annan et assumera les difficiles fonctions d'Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie. On connaît déjà les noms des successeurs éventuels, et chaque candidature est examinée à la loupe et avec circonspection.

Le fait est que le "nouvel Annan" devra être accepté par le gouvernement syrien qui est traditionnellement méfiant à l'égard des organisations internationales les soupçonnant d'être pro-américaines. Et dans la situation actuelle extrêmement grave, le gouvernement syrien se montre encore davantage sur le qui-vive que d'habitude.

Si Damas refuse catégoriquement telle ou telle candidature, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, en tiendra compte. Car l'objectif officiel de la médiation internationale n'est pas de renverser le président syrien mais de concilier les parties en conflit en Syrie. Ce qui nécessite de dialogue à la fois avec l'opposition et le gouvernement.

Tout le monde n'aspire pas à ce poste périlleux

A la fin de la semaine dernière, des fuites organisées ont eu lieu à New York, au siège des Nations Unies. Les fuites contenaient les noms des éventuels remplaçants d'Annan. Le secrétaire général de l'ONU choisit parmi des diplomates de divers pays qu'il connaît bien.

Toutes ces personnes ont une vaste expérience du travail aux échelons supérieurs de l'administration dans leurs propres pays et dans diverses organisations internationales. Parmi eux les Espagnols Javier Solana et Miguel Moratinos. Par ailleurs, selon les rumeurs, la liste comprend un représentant bien moins connu de la Malaisie, sans préciser de qui il s'agit.

L'ex-président finlandais et Prix Nobel de la paix, Martti Ahtisaari, également évoqué parmi les candidats aurait immédiatement décliné l'offre en déclarant: "Que ce soit quelqu'un d'autre."

Le successeur le plus probable de Kofi Annan est donc pour le moment Lakhdar Brahimi, diplomate algérien et fonctionnaire international expérimenté.

De tous les candidats cités, Lakhdar Brahimi est sans doute le personnage le plus sérieux. L'auteure de ces lignes est en mesure d'en juger à force d'avoir souvent interviewé à une époque Brahimi, Moratinos et Solana, car à diverses étapes de leurs carrières ils ont tous été impliqués dans les affaires du Proche-Orient. Lakhdar Brahimi semble le plus compétent du trio. Et c'est un fonctionnaire pondéré et circonspect.

Quant à Javier Solana, ses perspectives sont entachées par son passé de secrétaire général de l'Otan. Le gouvernement syrien refusera certainement ce candidat, car l'Alliance de l'Atlantique Nord est pour Damas une organisation clairement hostile qui ne laisse rien augurer de bon.

L'Algérien Brahimi souffre, certes, un défaut majeur, son âge: il a 78 ans. Toutefois, il semble en bonne condition physique. Néanmoins, pour le poste en question, il a un âge trop avancé.

En revanche, son expérience est particulièrement bien adaptée au règlement du problème complexe de la crise syrienne. Brahimi a été l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies pour le règlement en Afghanistan et en Irak, au cours des années les plus difficiles pour ces pays.

Il a notamment travaillé en Irak sous l'occupation américaine lorsque les hostilités se poursuivaient. C'était une mission périlleuse. Rappelons dans ce contexte qu'un émissaire haut placé des Nations Unies, le Brésilien Sérgio Vieira de Mello, a été tué en août 2003 à Bagdad lorsqu'un camion piégé conduit par un kamikaze a sauté devant l'hôtel où se trouvait la mission de l'ONU en faisant plus de 20 morts.

La Russie et les Etats-Unis ont leur mot à dire

Le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, devra de toute façon se décider dans les jours qui viennent. Et il ne s'agit pas seulement du fait que le mandat de Kofi Annan expire le 31 août et qu'ensuite il abandonnera définitivement le règlement de la crise syrienne.

Le fait est qu'à la mi-août Ban Ki-moon se prépare à soumettre au Conseil de sécurité des Nations Unies un rapport sur l'activité des quelque 300 observateurs internationaux en Syrie. Il serait logique qu'il en profite pour présenter son nouvel envoyé spécial dans ce pays en guerre.

Conjointement avec le successeur d'Annan, Ban Ki-moon devra consulter les grandes puissances mondiales et se prononcer sur l'avenir de la mission des observateurs internationaux. La Russie insiste sur la reconduction de leur mandat qui expire fin août. Or, les Etats-Unis déclarent qu'en pleine guerre civile la mission des observateurs n'a plus aucun intérêt. Après tout, ils étaient censés contrôler le respect de la trêve annoncée dès le 12 avril.

Cette considération mise à part, le "nouvel Annan" devra gérer les problèmes que l'"ancien Annan" n'a pas réussi à régler. Avant son départ, Kofi Annan a formulé le problème clé dans son article d'adieu récemment publié dans le Financial Times. "D'une part, la Russie, la Chine et l'Iran devraient concerter leurs efforts pour persuader le gouvernement syrien d'élaborer une politique visant à transmettre le pouvoir, car le gouvernement actuel a perdu sa légitimité." Selon Annan, le départ de Bachar al-Assad est la condition sine qua non du règlement de la crise.

Mais il ne suffit pas de convaincre le président syrien de démissionner de manière anticipée, explique Annan à son successeur dont nous ignorons encore le nom. "D'autre part, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l'Arabie saoudite et Qatar devraient exercer une pression sur l'opposition afin que ses représentants s'impliquent dans le processus politique général."

Cela "nécessite un dialogue avec les institutions et les organisations gouvernementales." "L'opposition devra reconnaître que l'avenir de la Syrie ne dépend pas uniquement du sort d'un seul homme, le président al-Assad", estime Kofi Annan.

L'opinion de Kofi Annan, qui est sur le point de partir, est précieuse. Mais elle ne devrait pas constituer la totalité du programme du nouvel envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies. En Syrie et dans les pays voisins, il sera également confronté à la nécessité de régler le problème complexe des réfugiés syriens. Beaucoup d'entre eux comptent sur l'assistance de l'ONU, car il n'y a plus personne d'autre. Rappelons qu'en Syrie au moins 16.000 personnes ont été tuées depuis le début du conflit.

Selon les statistiques de l'ONU, on recense officiellement plus de 150.000 réfugiés syriens dont plus de 53.000 en Turquie, plus de 45.000 en Jordanie, près de 37.000 au Liban et près de 14.000 en Irak.

Si la guerre civile se poursuit, les réfugiés seront encore plus nombreux. Aussi la principale mission du successeur de Kofi Annan est-elle d'arrêter la guerre.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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