L'immigration comme garant de la survie de l'économie

© Sputnik . Maria TabakLa frontière américano-mexicaine
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Le discours du président américain Barack Obama à la frontière américano-mexicaine sur la légalisation migratoire fait, évidemment, partie de sa campagne électorale, mais il s’agit en même temps d’un épisode marquant des événements survenant dans le monde entier: les flux de migration de plus en plus importants que même les Etats-Unis ne sont pas en mesure d'enrayer.

Le discours du président américain Barack Obama à la frontière américano-mexicaine sur la légalisation migratoire fait, évidemment, partie de sa campagne électorale, mais il s’agit en même temps d’un épisode marquant des événements survenant dans le monde entier: les flux de migration de plus en plus importants que même les Etats-Unis ne sont pas en mesure d'enrayer.

En fait, les paroles les plus marquantes de Barack Obama ont été prononcées précisément à ce sujet: l’impossibilité de stopper la migration. Ils voulaient édifier une barrière. Eh bien, elle est pratiquement terminée.

Un minimum de populisme ne serait pas superflu


"Ils", ce sont les républicains qui exigeaient de l’administration démocrate la fermeture de la frontière avec le Mexique et, par conséquent, avec toute l’Amérique du Sud. Et quel est le résultat? 20.000 hommes protègent la frontière, a rappelé Obama, soit le double par rapport à 2004. Or les républicains disent que seulement 44% de cette frontière de 2.000 miles sont réellement contrôlés. Alors combien de gardes-frontières faut-t-il au total?

Dans ce contexte on aurait pu se mettre à discuter quelle administration est la plus efficace pour rendre la frontière étanche. Mais le plus intéressant réside dans le fait que Barack Obama, candidat pour un second mandat présidentiel, fait tout autre chose. Il accule les républicains dans la situation du parti conservateur qui ne pense qu’à une chose, à savoir que tout soit "comme avant." Quant à lui et à son parti, ils sont le vecteur de la valeur américaine fondamentale qui, ne serait-ce que théoriquement, réside dans le fait que les Etats-Unis ne sont pas l’Europe, où est née et meurt actuellement l'idée d'une seule nation - un seul Etat. Les Etats-Unis sont une terre pour tous, indépendamment de la couleur de la peau et des langues.

En Europe, où en France la nationaliste Marine Le Pen est la principale adversaire de Nicolas Sarkozy, et dans d’autres pays du continent, les partis anti-immigration se renforcent, la société n’est pas la même qu’aux Etats-Unis. L’Europe vient à peine de commencer à prendre conscience qu’elle ne veut plus d’étrangers. En Europe, Barack Obama aurait hésité à agir comme il l'a fait cette fois à El Paso.

Mais en fait, qu’a-t-il fait d’aussi important? Il est notamment critiqué (sur le voyage à la frontière mexicaine) parce qu’il a seulement exprimé certaines idées, mais n’a proposé aucune mesure concrète, aucun projet de loi.

D’autre part, les idées sont telles que même les prononcer à haute voix est déjà un événement. Obama propose la légalisation et la citoyenneté américaine à tous ceux qui ont franchi à une époque cette frontière, ainsi que d’autres.

Or, cela concerne tout de même 25 millions de personnes. Une Amérique parallèle clandestine, qui vit hors la loi ou selon ses propres lois.

Si l'on aborde la question seulement comme un vulgaire politicien, il est facile d'imaginer le schéma: Obama, Américain de la première génération (son père est originaire du Kenya, lui-même est né aux Etats-Unis), veut transformer 25 millions de clandestins en 25 millions de citoyens prêts à déposer un bulletin Obama dans l'urne. Et même si la majorité républicaine au Congrès bloque son initiative, cela engendrera précisément le phénomène qui a conduit ce président à la victoire: les Américains "qui ne votent pas" voteront. Et les Latino-américains se rendront dans les bureaux de vote, cela ne fait aucun doute.

Les migrants jouent un rôle salvateur dans l'économie

Bien sûr, la reconnaissance par une puissance possédant d’importante forces de sécurité qu’il est simplement impossible de contrôler l’entrée des gens dans le pays n’est pas une mince affaire. Alors que dire des autres pays. Mais déclarer haut et fort que l’afflux constant des immigrés est le garant de la survie économique d'un pays est une tout autre chose. Tout le monde n’a pas l'audace de proférer de tels propos.

Néanmoins, aux Etats-Unis, du moins dans le cercle des démocrates, cette idée ne choque personne. Il ne s’agit même pas de l’histoire de la création des Etats-Unis en tant que société d’immigrants, mais de la réalité actuelle. Les Etats-Unis ont eu peur de la Chine, qui n’est peut-être pas encore devenue la première économie mondiale, mais qui a dépassé en 2010 les Etats-Unis dans la sphère productive (c’est-à-dire, sans le secteur tertiaire).

Et aujourd’hui, le tableau paraît complexe pour les Etats-Unis, mais avec une lueur d’espoir pour ce pays. En Chine, les salaires augmentent et la main d’œuvre diminue quantitativement. Or aux Etats-Unis, le dollar se déprécie (ce qui est bon pour les exportations) et l’efficacité de la production augmente. Toutefois, principalement grâce à l’automatisation. Quoi qu’il en soit, les économistes américains ont découvert que la sphère productive - et pas seulement le secteur bancaire - était une bonne chose car cela crée des branches connexes et stimule l'embauche.

Etonnamment, actuellement le chômage est le problème principal aux Etats-Unis. Mais peu estiment que les problèmes de l’immigration et du chômage sont liés. Tous sont conscients que le problème ici est structurel. Et les gens sont avant tout préoccupés par autre chose. Il ne s’agit pas de la main-d’œuvre mais des cerveaux. A El Paso, Barack Obama a mentionné les étudiants talentueux à qui on pourrait presque immédiatement octroyer la citoyenneté américaine, autrement "nous les formerons à créer des emplois pour nos concurrents." Globalement, on assiste à l’apparition d’une nouvelle politique relativement claire de retour aux Etats-Unis des industries et des cerveaux et innovations qui vont avec. Et les immigrants sont nécessaires pour cela.

Un défi pour tous


Pour terminer, quelques remarques au sujet des conséquences des événements aux Etats-Unis.

Par exemple celle-ci: pour l’instant il n’existe aucune idée commune et unanime au sujet d’une politique "juste" concernant les immigrants. Les Américains tirent d’un côté et les Européens de l’autre. Les discussions restent à venir, et il est positif que beaucoup de sujets, dont il était déplacé de parler il n’y a pas si longtemps, commencent à être débattus ouvertement, sans traiter les opposants de marginaux ou d’autre chose.

Ensuite, après septembre 2001, il semblait que le terrorisme et l’éventuelle guerre enter l’islam et le christianisme était le principal problème mondial. Mais aujourd’hui, il semble qu’il s’agit bien de l’immigration. Et une nouvelle fois, il n’existe aucun consensus international. A l’exception d’un seul: toutes les frontières sont des passoires. Pas seulement aux Etats-Unis, pas seulement en Europe ou en Russie. Par exemple, si les Laotiens immigraient constamment en Thaïlande, aujourd’hui de plus en plus de Birmans le font également. Et les problèmes sont globalement les mêmes que n'importe où en Europe. Mais ce processus prend de l'ampleur et dans l’ensemble la politique et l’économie internationales seront de plus en plus associées aux problèmes de l’immigration. D’autant plus qu’il est impossible de régler la question en verrouillant les frontières et en renforçant les dispositifs policiers.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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