Prix de la liberté pour la Russie

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par Boris Kaïmakov, RIA-Novosti

L'intervention du président russe Vladimir Poutine devant ses personnes de confiance à l'Université de Moscou ne laisse pas de place aux doutes: Vladimir Poutine prépare son deuxième mandat présidentiel en souhaitant léguer un pays démocratique économiquement fort à son successeur. La phrase où il indique que les citoyens russes ont définitivement opté pour la liberté n'est pas fortuite. Cette idée est la base de sa philosophie et le slogan principal de sa campagne électorale.

Cependant le président russe en exercice se rend parfaitement compte du fait que "le mot doux liberté" peut avoir un goût amer dans l'Etat où, comme il l'a reconnu, un tiers de la population vit au deçà du seuil de la pauvreté. Il ne pouvait pas faire fi de ces sentiments. Le président se demande: "Quel prix avons-nous payé pour cette liberté?". En effet, il est le premier homme d'Etat russe d'un si haut rang dont la réponse témoigne qu'il comprend la profondeur de la crise où se trouve le pays qu'il gouverne par les caprices du destin. Vladimir Poutine a sciemment évité les termes économiques en décrivant la crise. Il s'est adressé aux centaines de personnes de confiance dans une langue claire pour des millions de gens. Il a parlé des arriérés de salaires et de retraites, des grèves de mineurs, des nombreuses mises en faillite, d'une énorme dette extérieure, de la disparité économique des citoyens, du séparatisme ayant dégénéré en terrorisme. Le président n'a pas jugé nécessaire de dire que l'existence même de l'Etat russe était mise en question, mais n'importe que analyste impartial pourrait faire une telle conclusion. Au fond, le président l'a avoué en reconnaissant que l'Etat uni a commencé à perdre ses caractéristiques capitales.

S'agit-il d'un procédé utilisé traditionnellement par les dirigeants du pays depuis la révolution d'octobre 1917? On a rejeté à l'époque la responsabilité de tous les maux sur le régime tsariste, ensuite sur Joseph Staline et Nikita Khrouchtchev, ensuite sur le marasme de l'époque Brejnev. Mais il paraît plus sensé de croire que l'intervention de Vladimir Poutine ne cherche pas à accuser son prédécesseur Boris Eltsine d'être responsable de tous les problèmes comme on l'aurait fait par le passé. M.Poutine ne cite même pas ce nom car ce ne serait pas digne d'un homme politique russe de la génération actuelle. Son objectif principal était de décrire la situation telle qu'elle était au moment où il était arrivé au Kremlin.

Le président déclare honnêtement qu'il voudrait obtenir des meilleurs résultats. Il se montre assez autocritique. Mais ce n'est pas l'essentiel. Tous ceux qui suivent les activités de Vladimir Poutine se rappellent les premiers propos expressifs qu'il a émis au début de son mandat présidentiel. Il a lancé dans un moment de colère devant les journalistes: "le mécanisme d'Etat est relâché, mal tenu et craque de tous les côtés". Juriste diplômé, agent secret de profession et technocrate, Vladimir Poutine s'est rendu compte de son impuissance et de l'impuissance de l'Etat. Terrorisé par les démocrates de la pérestroïka, Vladimir Poutine a alors déclaré qu'il mettrait fin à la puissance absolue des barons régionaux avant d'insister sur l'édification d'une verticale du pouvoir solide. Le jeune président a mené cette réforme primordiale jusqu'au bout et personne n'osera contester le fait que la gestion de l'Etat s'est avérée efficace en quatre ans. Les analystes notent que la menace de dégradation des institutions publiques, d'affaiblissement de l'armée et des structures dites de force ne pèse plus sur le pays.

Ces processus ont permis à l'économie de sortir peu à peu de la crise. Le chef d'Etat estime que la situation économique a énormément changé. Il a les atouts suivants: le PIB a augmenté de 30%, le taux d'inflation a été divisé par trois, les investissements dans les immobilisations sont en hausse, le marché intérieur est en plein essor grâce à la croissance de la consommation. Le rouble russe gagne du prestige. Les Russes ont tendance de renoncer au dollar en chute libre en faveur de la monnaie nationale. Vladimir Poutine comprend que les retraités et les salariés du secteur public ne peuvent pas être satisfaits par le niveau de leurs revenus. Mais il peut dire honnêtement que le pays a réussi à mettre un terme au phénomène honteux des arriérés des salaires et des retraites. Il s'est également attribué le mérite de la hausse des pensions de retraite de 99%, le doublement des salaires réels et la diminution d'un tiers du taux de chômage. Cela lui permet d'estimer qu'il est parvenu à surmonter les sentiments de peur et de réprobation que la plupart des gens éprouvaient à l'égard des réformes. Les récentes élections législatives où les communistes, les opposants les plus farouches des réformes, ont essuyé une défaite humiliante, en sont la preuve.

S'adressant à ses personnes de confiance, à ceux qui soutiennent inconditionnellement sa politique, M.Poutine a reconnu que les gens sont toujours mécontents, qu'ils souhaitent améliorer leur niveau de vie. Cependant le président en exercice, qui est donné comme favori incontestable aux prochaines élections, peut affirmer sans crainte de se tromper qu'un tremplin pour le développement économique du pays a été créé.

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